
Le FBI arrête une juge pour "entrave" à l'arrestation d'un migrant

La police fédérale américaine a arrêté une juge en plein tribunal pour "entrave" à une opération d'arrestation d'un migrant, a annoncé vendredi le directeur du FBI, marquant une escalade dans le bras de fer engagé par l'administration Trump avec l'appareil judiciaire.
"Juste à l'instant, le FBI a arrêté la juge Hannah Dugan à Milwaukee, dans le Wisconsin", un Etat de la région des Grands lacs, a déclaré sur X Kash Patel.
Elle est poursuivie pour deux délits fédéraux, entrave et dissimulation d'individu, selon l'acte de mise en accusation publié par une cour du Wisconsin.
"Nous estimons que la juge Dugan a intentionnellement détourné des agents (de la police de l'immigration, ndlr) de l'individu devant être arrêté dans son tribunal (...) permettant à l'individu, un migrant clandestin, d'échapper à l'arrestation", a-t-il ajouté, précisant que le migrant avait finalement bien été arrêté après une poursuite à pied.
"Nous envoyons un message très fort aujourd'hui", a déclaré la ministre de la Justice Pam Bondi, dans une interview avec la chaîne Fox News.
"Si vous protégez un fugitif, peu importe qui vous êtes, si vous en aidez un (...) nous vous traquerons et nous vous poursuivrons en justice. Nous vous trouverons", a-t-elle ajouté.
- "Dictateur" -
Une porte-parole de l'agence fédérale des Marshals, chargée notamment de la protection de l'institution judiciaire et de la recherche de fugitifs, a confirmé à l'AFP que la juge avait bien été arrêtée par le FBI à 08H30 heure locale (13H30 GMT) vendredi.
Selon le Milwaukee Journal Sentinel, la magistrate âgée de 65 ans a été arrêtée dans l'enceinte du tribunal et a brièvement comparu vendredi devant un juge.
Son avocat, cité par le journal, a déclaré que son arrestation "n'avait pas été faite dans un souci de sécurité publique".
Plusieurs élus démocrates ont exprimé leur indignation.
"L'arrestation d'un juge en exercice par l'administration du président est une décision profondément grave et radicale", a déclaré dans un communiqué Tammy Baldwin, sénatrice démocrate du Wisconsin, s'alarmant d'une menace pour "la séparation des pouvoirs".
Pour l'élu démocrate de Floride Darren Soto, "c'est digne d'un dictateur d'un pays du tiers-monde".
La nomination de Kash Patel à la tête de la police fédérale au début de l'année avait fait face à la vive opposition des démocrates, qui craignaient que ce fidèle de Donald Trump n'utilise le FBI pour "se venger de ses ennemis politiques", selon les termes de l'influent sénateur démocrate Dick Durbin.
Depuis le retour du milliardaire républicain à la Maison Blanche fin janvier, de nombreux décrets exécutifs et autres mesures - notamment sur l'immigration - ont été retoqués par la justice.
- Séparation des pouvoirs -
L'administration Trump a décidé en retour d'engager une passe d'armes avec l'appareil judiciaire, et récemment deux juges ont pointé du doigt dans deux affaires différentes la dissimulation, voire la mauvaise foi, dont le gouvernement aurait fait preuve vis-à-vis de tribunaux qui contrarient sa politique d'expulsions massives.
Le président ne fait aucun mystère de sa volonté d'étendre au maximum ses prérogatives, face à celles des contre-pouvoirs que sont la justice et le Congrès.
Dans un entretien publié vendredi, le magazine Time lui a demandé s'il faisait sienne l'une des maximes de l'un des pères fondateurs des Etats-Unis, John Adams, le deuxième président des Etats-Unis, à savoir que l'Amérique était gouvernée par "des lois" et non par "des hommes".
"Je ne suis pas d'accord à 100%. Nous avons un gouvernement dans lequel les hommes sont impliqués dans les lois, et idéalement, ce sont des hommes honnêtes tels que moi", a répondu Donald Trump.
W.Richard--SMC